Feuilleton politique de l'été, la mise en place d'une taxe carbone en France suscite le débat, aussi bien sur les principes mêmes de cette taxe, que sur les modalités de son fonctionnement. Décryptons son contenu et voyons si elle peut réellement changer le comportement des Français en terme de préservation de la planète.
Bref historique
Reprenons tout depuis le début: Nicolas Hulot lance en 2006 un appel avec le Pacte Écologique demandant aux hommes et femmes politiques candidats à la présidence de s'engager en faveur de l'environnement, notamment en instaurant une "fiscalité environnementale".
En juin 2009, Europe Écologie réalise un score mémorable aux élections européennes, rappelant à la majorité que l'Europe et les Français sont en faveur du développement durable. Ceci pousse le président à remettre sur la table le dossier de la taxe carbone.
Une commission a planché durant un mois sur les modalités d’application de cette taxe. Présidée par l’ancien Premier ministre socialiste Michel Rocard, elle a rendu ses conclusions au gouvernement vendredi 24 juillet, et a immédiatement suscité de vives réactions.
M. Rocard et M. Borloo
Le projet final est finalement dévoilé par Nicolas Sarkozy en septembre 2009, avec quelques questions tranchées, et d'autres en suspens. Le projet de la taxe carbone débute actuellement le marathon parlementaire, pour être mis en place en 2010.
Contenu
La taxe carbone vise à taxer les énergies fossiles et polluantes, dans le but d'équilibrer le marché en faveur des moyens durables, que cela concerne l'énergie de chauffage, l'industrie, les transports.
Le fonctionnement de la taxe carbone est en réalité très simple: chaque produit émet une quantité de CO2, à travers sa fabrication, son acheminement etc., et ce CO2 aura désormais un coût: 17 € par Tonne. Plus faible que prescrit par la commission Rocard, ce coût sera amené à augmenter avec le temps.
La taxe prélevée sera par la suite entièrement redistribuée aux contribuables, en fonction de leur revenus, lieu géographique, etc. L'impôt n'est à priori pas utilisé pour favoriser les investissement dans les écotechnologies.
Autre fait non négligeable, l'électricité n'est pas taxée, ce qui semble contradictoire avec une taxe sensée favoriser les économies d'énergie. Cette mesure est considérée comme une faveur accordée au lobby du nucléaire.
Ce qui reste incertain, et alimente la polémique:
Le mode de reversement de la taxe est encore incertain, ainsi que les montants et ajustements en fonction des conditions de vie de chacun. On cite souvent l'exemple des personnes vivant à la campagne, n'ayant d'autre moyen que d'utiliser leur propre véhicule.
Pour certains, la taxe carbone est un impôt de plus, et est socialement injuste, puisque en toute logique, elle pousse à réaliser des investissement en faveur des économies d'énergies, que seuls les classes supérieures pourront se permettre.
De plus, certains mettent en avant que la taxe carbone, créant un effet dissuasif, puis un effet d'aubaine par la redistribution, aura un impact nul sur le comportement des Français, qui trouveront une compensation dans le chèque vert.
Décryptage ou De la nécessité d'un effort de chacun
De nombreuses voix s'élèvent contre la taxe carbone, y voyant simplement un impôt de plus, qui de plus serait injuste. Il faudrait recadrer les choses: l'impôt sur le revenu instaure une justice économique. La taxe carbone, ou du moins la fiscalité environnementale, a pour but d'instaurer une justice écologique, un autre pilier du développement durable.
D'après les sondages, il semblerait qu'une partie non négligeable des Français est en faveur de l'établissement d'une fiscalité en faveur de l'environnement. Cependant, par peur de voir apparaître un impôt de plus, la contestation se fait entendre, ce qui se trouve être normal et habituel (en France).
Cette taxe carbone est une autre forme du Bonus/Malus instauré pour les automobiles en 2008. Ce système a d'ailleurs poussé très rapidement les automobilistes à s'intéresser à des modèles économes et peu émetteurs de CO2. Les fabricants automobiles ont d'ailleurs très rapidement adapté leur offre. Ceci est couplé bien évidemment au coût du carburant élevé en Europe, ayant poussé les fabricants européens à créer des modèles plus économes en carburant, par rapport à Amérique du Nord où le carburant était peu taxé, et les automobiles plus énergivores.
Le point actuellement regrettable dans le projet de la taxe carbone se trouve sur l'électricité, non taxée, créant une inégalité. Pourtant, l'électricité est aussi émettrice de CO2, malgré le fait que la France utilise en grande partie l'électricité d'origine nucléaire.
Nous pouvons tout de même garder bon espoir, puisque le projet est encore ouvert aux discussions et aux compromis.